Société – le 20 Janvier 2012
précarité
Au 115, un appel sur deux reste sans solution d’hébergement
Mots clés : Logement, précarité, hébergements d’urgence,
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Les dispositifs d’urgence sont asphyxiés par l’explosion du nombre de sans-abri depuis dix ans. Au lieu d’accroître leur capacité, l’État préfère payer des nuits d’hôtel, très coûteuses.
Même pour les personnes à la rue, c’est « la lutte des places », alertait mercredi Christophe Robert, de la Fondation Abbé-Pierre. En décembre, près d’une demande d’hébergement sur deux faite aux 115 est restée sans solution, d’après le deuxième baromètre hivernal rendu public cette semaine par la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (Fnars). « Le nombre de places d’hébergement a augmenté ces dernières années (+ 62,20 % entre 2004 et 2010), mais moins rapidement que le besoin d’hébergement », explique son directeur, Matthieu Angotti.
Et pour cause, le nombre de sans-abri est passé, en à peine dix ans, de 85 000 à 150 000 personnes, dont la moitié sont des familles, indique un rapport de la Cour des comptes rendu à la mi-décembre. Le manque d’hébergements d’urgence s’est aggravé depuis la mise en place de la politique du « logement d’abord ». Benoist Apparu, secrétaire d’État au Logement, a donné priorité à l’accès à un logement pérenne pour les sans-abri, conformément au souhait des associations, tout en décidant un gel du nombre de places d’urgence. Or, le logement d’abord ne peut agir à court terme et « nécessite des moyens en termes d’accompagnement », explique Matthieu Angotti. Par ailleurs, l’ouverture de nombreux lieux d’accueil dépend des périodes de grand froid. La douceur hivernale n’a pas déclenché la procédure habituelle, ce qui aggrave la pénurie. Cette gestion au thermomètre se double d’une gestion financière désastreuse. Plutôt que d’augmenter le nombre de places en hébergement, l’État préfère financer des nuits d’hôtel, qui ont doublé entre 2004 et 2010, pour atteindre 15 016 places à l’année. Cela représente 93 millions d’euros de dépense en 2010, « un budget particulièrement élevé pour l’État » selon la Cour des comptes. Reste à savoir si ces conclusions seront prises en compte par les députés Danièle Hoffman-Rispal (PS) et Arnaud Richard (UMP) qui présentent un rapport d’évaluation jeudi prochain.
Pierre Duquesne